DINDON SAUVAGE
À deux c’est mieux!
Par
Christian de Beaumont
Depuis mes tout débuts, la chasse aux dindons a toujours été pour moi une affaire d’équipe. Au fil des années, j’en suis arrivé à identifier de nombreux avantages à chasser avec un coéquipier. Bien prendre conscience de ces avantages peut contribuer à accroitre l’efficacité de ceux qui abordent cette chasse en duo. Pour ceux qui le chassent en solitaire, vous serez peut-être tentés par une prochaine invitation? Enfin, voilà donc 10 bonnes raisons de chasser le dindon à deux !
Depuis près de 15 ans l’auteur Christian de Beaumont parcourt champs et forêts en duo avec son ami Réjean Lemay à la poursuite de ces grands gallinacés.
1. Localiser
Gloo, gloo, gloo! Le mâle se fait entendre, Caro part au Sud, Réjean à l’Est et moi au Nord, tous convaincus que le son provient bien de la direction que nous empruntons. J’ai appris ce jour-là! Les années suivantes, au même titre que l’infirmière qui effectue une double validation avec sa médication, notre duo effectue systématiquement une double identification de la provenance du son. Si la direction identifiée est la même pour nous deux, Réjean et moi poursuivons dans l’action. S’il y a un doute, nous attendons une deuxième confirmation afin de localiser avec certitude la provenance de l’appel. À cet égard, j’ai constaté que deux personnes arrivent beaucoup mieux à localiser la position d’un dindon qui effectue des appels qu’une personne seule.
2. Prospecter en double
Les personnes qui me connaissent le savent bien. Pour moi, la prospection quotidienne est une discipline que je pratique avec plaisir le plus sérieusement possible. Je le répète souvent, je sais… mais un dindon bien perché est pour moi un dindon à moitié récolté. De ce fait, avoir l’opportunité de percher deux groupes de dindons et parfois même plus en se divisant le travail est un avantage non négligeable. Cela se matérialise bien souvent par de nombreuses options matinales. Options multiples, qui riment la plupart du temps avec nombreuses opportunités!
Percher plusieurs groupes de dindons permet d’avoir plusieurs options de chasse matinale.
3. Confronter les opinions
Deux têtes valent mieux qu’une. Avoir la chance de prendre un moment de recul et de co-construire une stratégie commune de chasse par l’échange d’opinions différentes permet bien souvent d’envisager les défis ou les opportunités sous de nouveaux angles. Il y a certainement plus de croyances que de vérités dans les approches et stratégies de chasse, bénéficier des visions complémentaires d’un co-équipier est une véritable bénédiction, c’est d’ailleurs ainsi que l’on apprend le plus vite!
4. Doubler la mise
Le gros mâle attaque férocement notre appelant de mâle juvénile, Réjean est en position de tir depuis dejà plus d’une minute. Il patiente… deux grands Toms, attirés par tout ce tintamarre se précipitent à la course, mais ils sont encore à quelques centaines de pieds. Bientôt, nos deux fusils résonnent à moins d’une seconde d’intervalle. Je ne compte plus les fois où nous avons récolté deux Toms simultanément. Avec les années, nous avons appris à nous coordonner afin de réaliser ces doublés. La durée de nos voyages hors de la province est parfois limitée. Plusieurs motifs peuvent donc nous inciter à prendre l’approche en Duo. Un groupe de dindons comportant deux grands mâles ou plus lors d’un matin d’ouverture, une troupe rendue méfiante en fin de saison etc. Parfois vous n’aurez qu’une seule chance et elle sera sur de multiples Toms. Pourquoi ne pas en profiter en équipe?
L’avantage d’être deux chasseurs, c’est qu’il est possible de faire de beaux doublés lorsque plusieurs Toms se présentent en même temps.
5. Le sacrifice
Les chasseurs de Wapiti et jusqu’à un certain point les chasseurs de dindons chez nos voisins du sud pratiquent cette stratégie depuis fort longtemps. Au cours des vingt dernières années, plusieurs chasseurs d’orignaux et de dindons ont mis de l’avant cette approche dite de la technique du sacrifice qui consiste à travailler en équipe avec un ou plusieurs tireurs muets et un chasseur positionné en retrait qui effectue les vocalises. Ce dernier pourra même se déplacer au besoin en coulisse afin d’attirer le gibier, alors moins méfiant, à la portée d’un tireur embusqué. L’un des premiers à publiciser cette technique au Québec a été Denis Lapointe qui a également été, à ma connaissance, le premier à la nommer ainsi. Celui-ci a eu l’occasion de me démontrer à mainte reprises sur le terrain, le caractère redoutable de cette technique qui à elle seule, pourrait largement justifier le titre de cet article.
Un chasseur/calleur qui se sacrifie et un tireur muet devant est une excellente technique pour déjouer des mâles méfiants.
6. Le débarquement
Le ciel est encore plein d’étoiles lorsque Réjean me laisse débarquer du camion à l’entrée du sentier. Moins de 15 minutes après l’heure légale, je récolte un beau grand mâle qui s’est immédiatement dirigé vers moi après s’être déperché. Je coupe à travers notre champ. Un coup de téléphone rapide… le scénario de Réjean n’a pas fonctionné, il me récupère au coin du rang. Il n’est pas encore 7 h 30 et nous sommes en direction de notre plan C. Former un duo efficace ne veut pas dire être toujours assied au pied du même arbre. Les matins de beau temps sont une denrée précieuse et il importe de ne pas les gaspiller. Optimiser votre temps contribuera naturellement à augmenter les opportunités. Nous planifions maintenant soigneusement nos déplacements sur nos terres dont plusieurs sont adjacentes. Depuis quelques années, nous apportons deux véhicules afin d’optimiser nos déplacements et économiser un temps précieux. Un véhicule est laissé au bout de nos terres et l’autre tout à fait à l’autre extrémité, cela nous permet de nous déplacer continuellement sur du nouveau territoire.
Une bonne communication avec son partenaire permet de se repositionner rapidement lorsqu’un premier scénario n’a pas fonctionné.
7. Conclure par l’immobilité
Le dindon est arrivé en hypocrite sans un seul appel, Réjean a juste eu le temps de s’épauler. Le dindon est mal positionné, il est attentif et regarde dans notre direction. Il est maintenant nerveux. Nous retenons notre souffle sachant que notre temps est compté. Aucun mouvement perceptible n’est autorisé. Je gratte légèrement l’ardoise dissimulée à ma droite, le dindon se positionne et Réjean a une fraction de seconde pour le récolter. Il m’aurait été impossible d’épauler mon fusil sans être remarqué. La combinaison tireur immobile et calleur discret risque fort bien de vous donner d’excellents résultats lorsque vous chassez à deux au pied d’un même arbre.
Lorsqu’on chasse au pied d’un même arbre, la combinaison calleur et tireur est souvent gagnante.
8. Miser sur la grégarité
Bien que j’aie déjà écrit sur ce sujet à quelques reprises, il reste que la possibilité qui s’offre à un duo de chasseurs d’imiter assez facilement un groupe d’oiseaux par des vocalises simultanées de trois ou quatre appeaux peux être un avantage très important dans certaines circonstances. Avant d’abandonner des oiseaux bloqués ou tout simplement de voir l’heure l’égale s’écouler, cette approche plus agressive et inusitée nous a souvent permis de conclure de façon inattendue notre chasse. Oser est bien souvent payant dans ces circonstances! Leur curiosité et leur sens inné à se regrouper finit bien souvent par prendre le dessus sur leur instinct de survie.
9. Couvrir les angles morts
S’asseoir ou s’appuyer dos à dos sur un même arbre ou même perpendiculairement limite ou élimine considérablement les angles morts. À quelques reprises, j’ai manqué des dindons qui me sont véritablement arrivés dans le dos en toute discrétion. S’asseoir de façon perpendiculaire augmente considérablement le champ de vison de l’équipe tout en permettant une communication entre les équipiers. Pour ces raisons, c’est de loin le positionnement que je préfère en équipe de deux et selon moi le plus optimal.
Sur la photo deux coéquipiers assieds perpendiculairement couvrent pratiquement tous les angles morts.
10. Partager les souvenirs
En guise de conclusion, je vous parlerais d’un dernier avantage, plus intangible mais non moins important. Chasser en équipe permet de vivre les mêmes aventures et contribue à créer des souvenirs communs. Au fil des ans, on prend de plus en plus conscience de l’importance de la récolte de ces souvenirs impérissables. Vivre ses passions, c’est aussi les partager! Merci à mon coéquipier Réjean Lemay qui maintenant depuis près de quinze ans, prend place à mes côtés aux pieds de ces arbres qui nous permettent d’assister, ensemble, au spectacle incessant et toujours renouvelé de l’éveil de la forêt printanière tout en poursuivant l’un des gibiers les plus fascinants qui soient, le dindon sauvage!
Bonne chasse!
L’auteur avec son fils Alexandre de Beaumont lors de sa première chasse au dindon. La chasse en duo créée des moments forts et des souvenirs communs. Elle constitue également une excellente façon d’initier les nouveaux chasseurs!